Communiqué du Collège de la Masso-­Kinésithérapie suite à l
Le Collège de la Masso-­‐Kinésithérapie souhaite réagir suite à l’article paru dans la revue Prescrire du 1° décembre 2012, et intitulé : « Bronchiolites : pas de place pour la kinésithérapie respiratoire. »

Relatant une méta-­‐analyse publiée au premier trimestre 2012 dans la Cochrane Review concernant 9 études incluant 891 nourrissons de 0 à 24 mois hospitalisés, la revue « Prescrire » jette le doute sur l’ensemble des actes de kinésithérapie respiratoire pratiqués chez les nourrissons.

Dans une première étape, une lecture attentive du texte original permet à tous d’observer que les conclusions des auteurs fixent bien les limites de validité de cette méta analyse, strictement circonscrites aux enfants hospitalisés : « chest physiotherapy does not improve the severity of the disease, respiratory parameters, or reduce length of hospital stay or oxygen requirements in hospitalised infants with acute bronchiolitis non on mechanical ventilation ».

Il est par ailleurs remarquable de noter que la kinésithérapie n’est pas disqualifiée dans cette étude chez les enfants ventilés, les kinésithérapeutes étant associés depuis 40 ans à la prise en charge de ces nourrissons.

Transposer les conclusions de cette étude réalisée sur des nourrissons hospitalisés aux 97% ou 99% traités en ville, dénote une liberté d’interprétation qui dénature complètement le propos de cette méta analyse.

Notons que parmi ces 9 études, 5 décrivent des techniques se référant à la « conventionnal chest physiotherapy » mettant en œuvre des techniques (percussions, drainage de posture) abandonnées en France, car jugées inefficaces, voire dangereuses (1,2). Sur les 4 études restantes, l’une portant sur 15 patients, précise mal la technique utilisée et n’a pas été publiée (Lopes Galvany, 2004) ; une autre (3) porte sur 20 patients répartis en 2 bras, ce qui lui confère une faible puissance, une (Rochat 2010) n’inclut que des patients sous oxygène, donc particulièrement instables, quant au PHRC (Gagdos et col 2010), il pose la question de savoir si la kinésithérapie respiratoire peut diminuer le temps d’hospitalisation, au lieu de s’interroger sur la contribution de celle-­‐ci à l’amélioration de l’état clinique de l’enfant !

Au total, aucune des études citées en référence ne permet de porter un jugement sur l’efficacité, ou non, de la kinésithérapie respiratoire ambulatoire du nourrisson, ce qui disqualifie totalement les propos relatés par la revue « Prescrire ».

Dans une deuxième étape, « Prescrire » relate les effets indésirables, voire délétères de la kinésithérapie respiratoire mettant en avant le risque d’une fracture de côte pour 1000 actes. Cet argument, déjà présenté par cette revue en 2009, a fait l’objet d’une réponse à travers une étude multicentrique qui n’a retrouvé aucun cas sur 4103 actes réalisés, présentée au Congrès de Pneumologie de Langue Française en janvier 2009 (4).

En ce qui concerne les vomissements, ils peuvent en effet survenir, du fait de la distension thoraco-­‐ abdominale liée à l’obstruction bronchique, et font partie intégrante du tableau clinique :

-­ en dehors de tout acte de kinésithérapie respiratoire, spontanément ou suite à une quinte de toux. Le nourrisson, incapable d’expectorer seul, avale les secrétions bronchiques qui rendent alors difficile sa digestion.
– les kinésithérapeutes de ville sont très attentifs au délai minimum de deux heures entre l’alimentation et la séance de désencombrement. La situation peut être différente à l’hôpital, lorsque les enfants sont alimentés en continu. Le kinésithérapeute va s’assurer de la vacuité gastrique avant tout acte. Les techniques utilisées sont adaptées (moindre pression abdominale lors de l’Augmentation de Flux Expiratoire AFE), et il n’a pas été démontré de rapport direct entre l’acte de kinésithérapie respiratoire et les vomissements.

La séance est inconfortable, mais non douloureuse.

La contrainte ventilatoire exercée sur le nourrisson n’est pas anodine, mais le kinésithérapeute respecte le mouvement physiologique de la cage thoracique. Le geste est parfaitement identifié et codifié et clairement explicitée aux parents. La réaction d’opposition du nourrisson est compréhensible et s’exprime le plus souvent par des cris ou des pleurs, qui cessent immédiatement dès la fin de la séance.

Enfin, nous tenons à réaffirmer qu’il n’y a pas de kinésithérapie respiratoire de la bronchiolite, même si le cadre de la critique ici faite semble s’y rapporter. La kinésithérapie n’a jamais eu la prétention de soigner une maladie, d’éradiquer un virus ou une bactérie. Les praticiens prennent en charge un enfant unique, présentant un tableau clinique d’obstruction des voies aériennes et font le diagnostic différentiel de cette obstruction, en isolant la part liée à l’encombrement, qui justifie leur intervention et celle liée à l’inflammation, voire au bronchospasme.

C’est uniquement cette variable qui permet au praticien, tant de doser et d’adapter ses gestes que de préconiser leur posologie, en collaboration avec les parents de ces petits patients, témoins attentifs et incontournables de l’évolution de la qualité de vie de leur enfant.

Les kinésithérapeutes sont conscients du manque d’évaluation de ces techniques, et s’efforcent de combler cette lacune. La formation universitaire des kinésithérapeutes semble être la seule voie possible pour leur permettre l’accès indispensable à la recherche.

Le « correctif » apporté par « Prescrire » dans son communiqué du mercredi 12 décembre ne nous amène pas à modifier le sens de nos propos. Si la rédaction admet avoir extrapolé les conclusions du rapport Cochrane, précise en filigrane qu’elle aurait probablement dû faire preuve de plus de prudence et de rigueur dans l’exposé de ses propos, elle maintient néanmoins sa position, bien que celle-­‐ci ne s’appuie sur aucun argument scientifique, aucune publication, aucun élément de preuve.

Les bonnes pratiques en matière de prise en charge des nourrissons atteints de bronchiolite s’appuient sur des recommandations, connues de tous, dont la Haute autorité en Santé est garante (2).

La kinésithérapie respiratoire est la pierre angulaire de la prise en charge des nourrissons atteints de bronchiolite.

Pour le Collège de la Masso-­‐Kinésithérapie Le Président S. CELERIER
Contact : [secretariat@college-­‐mk.org]mail:secretariat@college-­‐mk.org

Références :
1. Conférence de consensus sur les techniques de kinésithérapie respiratoire non instrumentale, ANAES déc 1994, téléchargeable sur internet à l’adresse suivante

2. Conférence de consensus prise en charge des bronchiolites ANAES sept 2000 téléchargeable sur internet à l’adresse
(pour la version anglaise) et (pour la version française).

3. Postiaux G. Chest physical therapy is effective in reducing the clinical score in bronchiolitis : a randomized controlled trial. Rev. bras. fisioter. vol.16 no.3 São Carlos May/June 2012 Epub Apr 12, 2012.

4. Chapuis A., Maurric-­‐Drouet A., Beauvois E. La kinésithérapie respiratoire ambulatoire du nourrisson est-­‐elle pourvoyeuse de traumatisme thoracique ? Kinésithér. Rev. 2010, 108, 48-­‐ 54.