Fast-facts : Réduire le risque de lésion du ligament croisé antérieur en sports pivots

Aujourd’hui pour ActuKiné Timothée Gillot vous guide, alors qu’est ce qu’y est à savoir pour réduire le risque de lésion du LCA ?

Timothée Gillot est un kinésithérapeute reconnu pour ses qualités pratiques et techniques mais aussi pour ses connaissances universitaires. Pour les abonnés d’ActuKiné Timothée à également mis à disposition sur la plateforme une ressource complète sur la rééducation et la prévention du LCA.

 

Le risque lésionnel du LCA se modélise par des approches complexes de facteurs et de patterns d’interaction variables selon les individus.

On vous présente l’approche linéaire et cumulative d’effet par l’identification des facteurs de risques. Par exemple : je suis une femme, de 19 ans, j’ai un ratio IJ/Q défavorable, j’ai 30% de risque de me blesser ce soir – chiffre arbitraire. Cela ne suffit plus à résumer ce qui fait basculer un sportif dans la lésion.

Tout comme en météo, où l’arrivée d’une masse d’air froide ne suffit pas à prédire un orage, la simple présence de facteurs de risque n’assure pas leur interaction le jour J. Pour chaque sport, chaque sportive ou sportif, les déterminants du risque vont interagir de façon différente, avec un poids différent, et ce pour chaque situation rencontrée. Tout l’enjeu devient alors de maitriser ces interactions et les poids relatifs de chaque déterminant. Une lecture intéressante à ce propos est proposée par Bittencourt et ses collaborateurs en 2016 (DOI : 10.1136/bjsports-2015-095850).

 

Des facteurs externes (évènement aléatoire, fatigue, stress …) peuvent perturber le système.

Fatigué ? Anxieux ? Sous pression dans un match à enjeu ? Les auteurs parlent d’une « lésion hors contact conceptualisable comme une séquence d’erreurs d’activité neurale qui résulte en une incapacité à maintenir la stabilité du genou » (Shultz et al., 2019). Le niveau de preuve est faible sur ces notions, car ces situations sont complexes à modéliser en laboratoire. Notez la charge d’entrainement, la fatigue mentale, la fatigue du système central (les contrôleurs, le SNC) et périphérique (les effecteurs). Ils ont des effets sur la prise de décision, l’organisation du mouvement dans sa production et sa régulation mais aussi par exemple la technique sportive !

Autant de grains de sable dans un modèle d’interaction complexe. Le risque change de façon dynamique, dès lors, attention à ne pas sous estimer la complexité des interactions entre la fatigue physique, psychologique, l’aléatoire, et le contrôle neuromusculaire. À ce propos, nous vous recommandons de lire les éléments de discussion de la revue systématique d’Anne Benjaminse en 2019 (DOI : 10.1007/s40279-019-01052-6) !

 

Le risque de lésion du LCA est réductible de 50%.

On ne compte plus les programmes de prévention de la lésion du LCA dans les deux dernières décennies. Beaucoup d’écrits en ont étudié les effets. En réalité, l’excellente méta-analyse de Petushek et al. (DOI : 10.1177/0363546518782460) montre une efficacité cumulée, et ce depuis 2008 ! Le risque est réductible de 50% dans la population générale, et de 67% chez les femmes en sports pivot (OR 0,5 [0,41-0,59] et OR 0,33 [0,27-0,41] respectivement). Même si des éléments de preuve manquent dans les populations masculines, on sait faire et même bien faire.

Reste aux kinésithérapeutes et acteurs du sports une autre difficulté : appliquer !  En effet, les taux d’observances sont compris entre 13 et 20 %, et tombent à 4% en zone rurale !

 

Les points clés pour réduire le risque de lésion du LCA sont connus.

Petushek et al. le montrent : l’exposition continue renforce l’effet prophylaxique. Par exemple, vous pouvez privilégier des actions tout le long de la saison. Les modalités peuvent être : environ 30 minutes, bi-hebdomadaires, dès la puberté (12-14 ans). Vous pouvez aussi impliquer le coach. Et oui ! Il est montré que sensibiliser les encadrants est indispensable : l’observance de 87% enregistrée par Olsen et al. en 2005 montre la réceptivité des acteurs de terrain dès lors que ceux-ci ont été sensibilisés à la problématique.

En termes de contenu, la littérature converge sur quelques points. À votre disposition : des échauffements, des fentes, l’implication des ischio-jambiers, du triceps sural, des exercices plus analytiques et des exercices variés proche du geste sportif de stabilisation et  d’atterrissage. Nous vous recommandons l’excellent outil d’aide à la décision de Petushek et al. (DOI : 10.1177/0363546518782460) !

 

Les approches de réduction du risque des lésions du LCA sont potentialisables.

En situation de fatigue, d’imprévu, tous les processus de la perception-action sont compromis. Dès lors, entrainer en intégrant la fatigue, des tâches ouvertes, développer la capacité aérobie, anaérobie, évaluer le sommeil et la récupération sont des points essentiels.

Le travail sur le terrain pourra donc inclure des tâches complexes, spécifiques au sport, cognitivement exigeantes en état fatigué. Dans leurs stratégies, l’entraineur ou le kinésithérapeute peuvent utiliser des focus externes : l’observation, l’imitation ou l’imagerie
mentale pour stabiliser le mouvement.

À ce sujet, nous vous recommandons la lecture de l’excellent éditorial d’Anne Benjaminse en 2021 (DOI : 10.1007/s40279-021-01560-4) !