L’épidémiologie des lombalgies chroniques montre une évolution du pic de personnes atteintes vers un âge plus avancé, accompagnant le vieillissement progressif de nos sociétés. Aux états unis, les baby boomers, qui sont aujourd’hui les générations à arriver en retraite, représentent 51 % des lombalgies chroniques. La prévalence chez les plus de 65 ans est estimée entre 18% et 29% et au regard du nombre croissant de cette population (un habitant sur autre aura plus de 65 ans en 2042 dans les pays occidentaux), il y a de quoi s’inquiéter.
Rassurons nous, nos politiques ont montré qu’ils savaient parfaitement gérer ce genre d’évènements prévisibles, lol.
Le langage courant chez le praticiens kinés ou médecins s’avance avec prudence sur les manipulations des personnes âgées, arguant de la détérioration progressive des surfaces articulaires, la prolifération des ostéophytes et parfois l’installation de syndesmophytes.
Du coté de la recherche bibliographique :
Elle est réalisée sur quatre bases de données, PubMed, EMBASE, OVID, et CINAHL. Sur 405 articles identifiés, 38 textes sont sélectionnés, seuls 4 sont conservés, randomisés avec thérapie manuelle et population âgée.
Bon, ce n’est pas bien lourd pour proposer des conclusions mais voyons ce que ces études nous racontent.
Du coté des effets :
Sur la douleur, pas terrible, pas de différence avec un placebo (fausse manipulation), les techniques manuelles de chiropractie ou de physiothérapie n’offrent hélas pas de résultats probants.
Sur le coté fonctionnel, une étude (thrust versus non thrust) est stratifiée par classe d’âge et montre potentiellement un effet sur les plus âgés (au dela de 70 ans versus 60-69), mais la taille de l’effet est faible.
Du coté des effets indésirables
Une seule étude mesure ces évènements et compte 250 rapports sur une ensemble comparé entre manipulation et placebo. Cela parait énorme mais les aléas de santé à partir d’un certain âge sont fréquents. Il s’avère que la répartition et la sévérité des problèmes entre le groupe placebo et le groupe manipulation est quasi identique. Aucun des évènements sévères (syncope, douleur dans la poitrine, paresthésie) n’est attribué à la manipulation, seuls 10 évènements bénins, paraissent être des conséquences directes du traitement, pas de quoi s’alarmer donc. Les études cités montrent aussi que la vélocité et l’intensité des gestes est modulée par l’examen clinique préalable et la fragilité évaluée de la personne.
Les limites de cette revue sont évidemment liées au nombre d’étude, à l’intérieur desquelles les critères d’exclusion écartent toutes les personnes porteuses de critères de comorbidités.
Au final :
- nous manquons de données
- des preuves plus que modérées
- des évènements indésirables attendus qui ne sont pas au rendez vous lorsque les gestes sont adaptés aux états biomécaniques.
On devine bien la conclusion des auteurs : de nombreuses et meilleurs études sont nécessaires. Les risques paraissent minimes mais les effets positifs aussi.