PARTIE 2 : exercice physique et douleur chez l’homme

Chez le sujet sain, l’EP fait monter les seuils d’activation de la douleur en conditions expérimentales.

Dans certaines pathologies comme la lombalgie, l’ostéo-arthrite/arthrose, les douleurs myofasciales, certaines fibromyalgies, etc., l’EP semble également promouvoir l’analgésie.

Dans d’autres conditions comme le Syndrome de Fatigue Chronique ou certaines fibromyalgies, l’EP semble plutôt augmenter les douleurs (dans ces cas, il est supposé que les seuils d’activation de la douleur ne montent pas par manque d’activation des voies inhibitrices descendantes).

Au niveau de la partie caudale du tronc cérébral, trois noyaux (le nucleus raphe magnus (NRM), le nucleus raphe obscurus (NRO) et le nucleus raphe pallidus (NRP)) sont impliqués à la fois dans la modulation de la douleur et les outputs moteurs : ils constituent un lien anatomique potentiel entre EP et perception de la douleur.

Comme chez l’animal, il existe un fort niveau de preuves montrant que des mécanismes opioïdes jouent un rôle de médiateur dans l’analgésie induite par l’exercice (AIE). En effet, de nombreuses études montrent que des exercices réalisés à haute intensité comme la course à pied ou le vélo engendrent une analgésie qui est inversée par la naloxone (un antagoniste des récepteurs à la morphine).

De hauts niveaux d’EP sont corrélés à une plus forte CPM (Conditioned Pain Modulation). On considère que chez le sujet sain, la CPM est un bon moyen de mesurer la capacité d’inhibition centrale.

Chez des patients atteints d’ostéoarthrite/arthrose, il existe une hausse des seuils de pression à la douleur (les PPTs) chez ceux qui ont une CPM normale et une baisse des PPTs chez ceux qui ont une CPM réduite. Ce fait suggère que l’EP et la CPM utilisent des mécanismes physiologiques similaires.

Plusieurs travaux montrent une réduction de la sommation temporelle (une mesure de l’excitabilité centrale) chez les sujets sains et dans certaines pahologies après des EPs en aérobie et en isométrie.

Trois types de cellules existent au sein de la RVM : des cellules dites « ON » qui font la promotion de la nociception quand elles sont activées, des cellules dites « OFF » qui inhibent la nociception une fois activées et enfin, des cellules dites « neutres » qui ne répondent pas à des stimuli nociceptifs. Il est proposé qu’un décalage de l’équilibre d’activation entre cellules ON et OFF puisse expliquer l’hyperalgésie ou l’analgésie induite par l’EP.

Les endocannabinoïdes du SNC jouent également un rôle dans l’AIE. Les récepteurs cannabinoïdes sont présents dans les zones de modulation de la douleur du cerveau et de la moelle épinière ; l’EP augmente les niveaux d’AEA (endocannabinoid N-arachidonylethanolamine) dans la circulation chez les sujets sains.

Conclusion

Un bon nombre de conditions douloureuses chroniques sont associées à une baisse de CPM et à une hausse de sommation temporelle (wind-up) pouvant expliquer le manque d’effet analgésique immédiatement après l’EP ou même une augmentation des douleurs par manque d’inhibition/hausse de l’excitabilité. En revanche, il est supposé qu’un EP répété régulièrement puisse restaurer cette baisse de CPM. L’EP régulier semble analgésique par la réduction de la phosphorylation des récepteurs NMDA, la diminution de l’expression du transport de sérotonine (donc l’augmentation des niveaux de sérotonine) et l’augmentation des niveaux d’opioïdes au sein des circuits d’inhibition centrale (PAG et RVM notamment). Il est proposé que l’équilibre entre inhibition et excitation dans le SNC détermine si l’EP va moduler la douleur à la hausse ou à la baisse. Différents facteurs comme le niveau d’activité physique, la condition physique de l’individu, le stade de ses lésions ou encore la CPM influencent cet équilibre.

Références

Lima LV, Abner TS, Sluka KA. Does exercise increase or decrease pain? Central mechanisms underlying these two phenomena. J Physiol. 2017 Mar 29.
Abstract ici