METHODE : dans une première partie d’expérience, des rats subissaient une chirurgie où l’on provoquait soit un traumatisme facettaire cervicale (la chirurgie de lésion facettaire est décrite en détails dans l’article et consiste en un étirement capsulaire de 0.7mm au niveau C6-C7) soit une procédure placebo. Ensuite, ils recevaient soit une injection intra-articulaire de bupivacaïne (un anesthésique local) soit une injection saline (placebo) : récapitulons :
– Lésion facettaire réelle + injection d’anesthésique immédiate (inj-BP0h ; n=12)
– Lésion facettaire réelle + injection saline immédiate (inj-VEH0h, n = 13)
– Lésion facettaire réelle + injection d’anesthésique après 4j (inj-BPd4 ; n=12)
– Lésion facettaire réelle + injection saline après 4j (inj-VEHd4, n = 11)
– Lésion facettaire placebo + injection saline immédiate (sham-VEH0h ; n = 12)
– Lésion facettaire placebo + injection saline après 4j (sham-VEHd4, n = 12)
L’hyperalgésie mécanique était mesurée avant puis à J+1, J+3, J+5 et J+7 après la lésion chirurgicale à l’aide d’un protocole classique (monofilaments de Von Frey). Des enregistrements électrophysiologiques extra-cellulaires étaient réalisés à J+7 parmi 19 rats appartenant à chacun de ces groupes pour connaitre l’état d’excitabilité de la corne postérieure. Ce protocole a été complété par une mesure de l’activité des marqueurs protéiques excitateurs (le protocole est très complexe : ami lecteur/chercheur vos éclaircissements notamment sur l’immunohistochimie fluorescente sont les bienvenus).
Dans une seconde partie de l’expérience, on infiltrait les rats avec lésion réelle à 4h (inj-BP4h; n = 5), 8h (inj-BP8h; n = 6) et 24h (inj-BPd1; n = 6) ; ces délais étaient choisis à partir d’une étude antérieure de Crosby et al. (2) qui montrait un développement de l’hyperalgésie et de l’hyperexcitabilité neurale entre 6h et 24h après lésion facettaire cervicale. Ensuite, on étudiait la survenue d’une sensibilisation spinale (hyperalgésie et hyperexcitabilité spinale neuronale) en mesurant l’hyperalgésie mécanique avant, à J+1 et à J+7, et en complétant le tout d’une étude électrophysiologique à J+7.
RESULTATS : une injection d’anesthésique intra-articulaire immédiate atténuait significativement l’hyperalgésie mécanique (par rapport à une injection placebo ou une injection d’anesthésiant plus tardive), l’hyperexcitabilité neuronale de la corne postérieure (baisse significative à J+7 du nombre de potentiels évoqués par des stimuli nociceptifs et non nociceptifs) et réduisait l’activité de certains marqueurs protéiques excitateurs (système glutaminergique).
CONCLUSION : une hyperalgésie mécanique, une hyperexcitabilité neuronale et une dérégulation de l’activité des marqueurs protéiques glutaminergique étaient induites en quelques heures par l’activité afférente en provenance de l’articulation lésée. Un anesthésique à action rapide administré immédiatement après la lésion empêchait le développement de cette sensibilisation. Le même phénomène était observé pour une injection donnée dans les 4 heures après lésion, mais pas au-delà (8h-24h).
COMMENTAIRES AK : un article bien construit qui, bien qu’il concerne l’animal, apporte des informations précieuses sur la genèse possible de la sensibilisation centrale : les inputs nociceptifs en provenance de la capsule sont ici capitaux pour son développement. Il est impressionnant de constater qu’un même traitement qui marche sous 4h n’a plus d’impact à 8h ce qui tend à montrer que la sensibilisation centrale, une fois déclenchée, peut fonctionner en l’absence de volées nociceptives.
Références
(2) Crosby ND, Weisshaar CL, Winkelstein BA. Spinal neuronal plasticity is evident within 1 day after a painful cervical facet joint injury. Neurosci Lett. 2013 May 10;542:102-6. doi: 10.1016/j.neulet.2013.03.019. Epub 2013 Mar 21. En accès libre ici