30 individus ont participé à cette étude en 3 parties : 15 sujets étaient lombalgiques avec sensation de raideur lombaire et 15 sujets sains servaient de contrôle.

Première partie
En utilisant un dispositif appliquant une force standardisée sur la colonne permettant une mesure objective du déplacement de la sonde d’application (2), les auteurs ont évalué le rapport entre la perception de se sentir raide au niveau lombaire (mesurée par NRS 0-100) et la raideur objectivée par l’appareillage. Il n’a pas été retrouvé de relation significative entre raideur perçue et raideur réelle chez les lombalgiques et ce, quel que soit la force appliquée (55 N, 60 N, 70 N) ou le type de mesure de raideur (raideur moyenne ou de fin d’amplitude). Ensuite, les auteurs ont cherché à savoir si les mesures objectives de raideur étaient différentes entre ceux qui étaient lombalgiques avec sensation de raideur et les sujets sains. Ils n’ont retrouvé aucune différence significative et ont conclu que « se sentir raide n’est pas la même chose que l’être réellement ».

Seconde partie
Les auteurs ont appliqué des forces différentes sur la colonne des 30 participants en leur demandant d’évaluer la magnitude de la force appliquée (forces entre 50 et 70 N et test à 60N). Si les deux groupes surestimaient les forces appliquées, la magnitude de cette surestimation était plus importante chez les sujets lombalgiques (31% contre 15%). Il existait une association entre l’importance de la perception d’être raide et l’importance de l’erreur d’estimation. Comme les forces étaient appliquées par deux, les auteurs en ont profité pour s’intéresser à la capacité des sujets à ressentir la variation ressentie de la force appliquée entre les deux essais (discrimination). La discrimination des sujets lombalgiques était meilleure que celle des sujets sains. Les auteurs concluent que les lombalgiques avec perception de raideur montrent un profil de protection : ils surestiment les forces appliquées au niveau de leur dos et sont plus performants pour détecter les variations de ces forces par rapport à leurs homologues du groupe contrôle.

Troisième partie
Les auteurs ont cherché à savoir s’il était possible de manipuler cette erreur (la surestimation) perceptive en ajoutant simultanément aux stimulations mécaniques de la colonne des inputs auditifs (absence de son, bruit contrôle et bruit de grincement). Les sujets devaient à nouveau évaluer les forces appliquées sur leur colonne mais dans 3 conditions auditives. Les deux groupes se comportaient de manière identique avec une différence significative dans l’erreur d’estimation plus importante dans la condition de bruit de grincement. Les auteurs ont finalement répété l’expérience en créant une condition où ils faisaient baisser le volume du bruit de grincement. A nouveau, il n’existait pas de différence entre les groupes qui se comportaient de la même manière : dans la condition de baisse de volume, l’estimation de la force appliquée baissait par rapport à la condition où le volume était stable.

Conclusion : la perception de raideur au niveau du dos n’est pas en lien avec des mesures objectives de raideur lombaire. Elle est en rapport avec une surestimation des forces appliquées à la colonne ce qui supporte l’idée que se sentir raide peut représenter une construction perceptuelle de protection.

Références

(1) Tasha R. Stanton, G. Lorimer Moseley, Arnold Y. L. Wong & Gregory N. Kawchuk. Feeling stiffness in the back: a protective perceptual inference in chronic back pain. Scientific Reports 7, Article number: 9681 (2017). En accès libre ici

(2) Fritz, J. M. et al. Preliminary investigation of the mechanisms underlying the effects of manipulation: exploration of a multivariate model including spinal stiffness, multifidus recruitment, and clinical findings. Spine 36, 1772–1781 (2011).