Qui peut bénéficier au mieux de l’entrainement à la marche assitée par robot? Un essai clinique randomisé chez des patients en phase subaigue d’AVC.

Quels patients hémiplégiques pourraient tirer le plus de profit de l
Contexte :
L’entraînement à la marche assistée par robot après AVC a pour objectif de permettre aux patients lourdement atteints de marcher indépendamment, mais les résultats actuels restent encore conflictuels.
Objectif :
Les auteurs ont eu pour objectif d’identifier les sous-groupes de patients qui seraient le plus à même de tirer le plus de bénéfice du dispositif.
Méthode :
Un total de 48 participants avec déficits moteur et limitations à la marche dans la phase sub-aigüe d’un AVC furent stratifiées par l’Index de motricité en 2 groupes avec déficit élevé (<29) et bas (>29). Chaque bras était ensuite divisé et répartit aléatoirement dans un groupe robotique ou un groupe contrôle (GR ou GC) à environ 20 jours de l’AVC. Tous les patients ont bénéficié de 2 sessions par jour, 5 jours par semaine pendant 3 mois. Ceux du GR ont bénéficié de 20 séances d’entrainement à la marche assistée par robot dans les 4 premières semaines du protocole de recherche en utilisant un entrainement axé sur le contrôle des trajectoires articulaires et programme de rééducation conventionnel raccourci., tandis que ceux du GC ont bénéficié uniquement de l’entrainement classique à la marche. Le critère de jugement principal était la Functionnal Ambulation Category (FAC), et les mesures secondaires étaient le Rivermead mobility index (RMI) et le test de 6min de marche, tous effectués à l’admission de l’hôpital et à sa sortie.
Résultats :
Le groupe de bas niveau moteur assigné au dispositif électromécanique s’est significativement amélioré à la FAC (P<0.001), RMI (P=.001), et distance de marche (0.029). Les thérapies conventionnelles et robotiques étaient équivalentes dans le bras haut niveau moteur.
Conclusion :
La thérapie assistée par robot combinée à la thérapie conventionnelle semble être plus efficace que la thérapie conventionnelle seule chez les patients avec un déficit moteur plus important durant la phase d’hospitalisation suivant l’AVC.

Référence: Who May Benefit From Robotic-Assisted Gait Training? A Randomized Clinical Trial in Patients With Subacute Stroke_Giovanni Morone, Maura Bragoni, Marco Iosa, Domenico De Angelis, Vincenzo Venturiero, Paola Coiro, Luca Pratesi and Stefano Paolucci_Neurorehabilitation and Neural Repair_published online 26 March 2011

Analyse critique de l’étude:

Cet essai est un essai de confirmation avec comme design un essai clinique randomisé stratifié. L’objectif de l’essai est parfaitement défini et le résultat mis en avant correspond directement à l’hypothèse formulée a priori.

Biais méthodologiques:
Un biais de confusion est écarté car l’essai comporte un groupe contrôle pour chaque stratification et l’effet du traitement est déterminé par rapport à ces groupes contrôle.
Un biais de sélection est écarté car l’essai est randomisé. Après avoir été stratifiés, les deux groupes ont été séparés en 2 autre groupes avec un moyen de randomisation réellement aléatoire (liste générée par ordinateur: “per 2 blocked randomization lists, generated electronically by www.random.org” p3 dans la partie method). La méthode d’allocation des traitements est donc décrite avec suffisamment de précision pour pouvoir formellement conclure à l’imprévisibilité de la randomisation. Les groupes constitués par la randomisation s’avèrent comparables sur l’ensemble des variables relevées. Aucun déséquilibre important sur une variable fortement pronostique n’est noté.
Un biais de mesure/évaluation n’est pas complètement écarté de premier abord car l’essai n’a pas été réalisé en double aveugle. Cependant cet absence de double insu est acceptable car il était impossible pour les auteurs “d’aveugler” les patients et thérapeutes au traitement. De plus l’évaluateur était quant à lui bien en aveugle ce qui permet donc de dire qu’un biais d’évaluation est raisonnablement écarté.
Le biais de suivi/réalisation peut également être écarté malgré l’absence de double insu car les taux d’écart au protocole et d’arrêt du traitement sont similaires dans les deux groupes.
Un biais d’attrition est écarté car aucun patient n’a été perdu de vue. Ainsi, tous les patients randomisés ont été analysés (cf le flow chart). De plus l’analyse statistique finale a été réalisée en “intention de traiter”.

Réalité statistique du résultat:
L’amélioration de l’indépendance de marche des patients du Robotic Group par rapport au Control Group du Low Motor subgroup est bien statistiquement significative (<5%). De plus ce calcul a été effectué sur le critère de jugement principal déterminé au préalable.
Un doute pourrait être émis quant à l’absence apparente de contrôle de l’inflation du risque alpha du aux mesures répétées, cependant le p à 4 sem (0,002) et à la sortie du centre (0,001) sont suffisamment significatifs pour pouvoir raisonnablement écarter cette inflation du risque alpha.

Cohérence externe:
Aucune autre études similaire n’existe à ce jour.
L’étude post-hoc des sous groupes des autres études portant sur les patients en phase aigue et subaigue montre une certaine hétérogénéité.
Il n’est donc pas possible à ce jour de pouvoir affirmer que le résultat de cette étude n’est pas une erreur de première espèce, c’est-a-dire un faux positif.

Pertinence clinique
Le critère de jugement principal est la FAC, il analyse le niveau d’indépendance de la marche et peut donc être considéré comme pertinent.
La taille de l’effet correspond à une différence moyenne entre les 2 groupes de 2 point sur la FAC, seulement les intervalles de confiance se rejoignent (sans se toucher, attestant de la différence statistiquement significative entre les groupes) à tel point qu’il n’est pas possible de raisonnablement exclure un effet trop petit pour être cliniquement pertinent.
Les patients sont représentatifs des patients hémiplégiques vu en pratique. Il n’y a pas eu d’exclusion arbitraire de certains patients, L’étude portant uniquement sur des patients en phase subaigüe, les résultats ne devraient donc pas être extrapolés à tous les stades d’évolution de la pathologie.
L’effet du traitement a été comparé à une rééducation classique effectuée par un kinésithérapeute diplômé. Actuellement il existe encore des différences de prise en charge en fonction des centres de rééducation ou des pays, cette réalité implique donc la nécessité d’effectuer ce genre d’étude en multicentrique afin de pouvoir en extrapoler plus facilement les résultats.
La balance bénéfice/risque est acceptable car même si il n’y a pas de critères de jugements secondaires prévues pour contrôler la sécurité de l’intervention (ex: spasticité, contrôle de la tension…), il n’y a eu aucun arrêt complet du traitement et les « discontinued intervention » du flow chart (arrêts temporaires) sont de même nature et dans les même proportions dans les groupes robot et dans les groupes contrôle
L’applicabilité du dispositif reste quant à elle compliquée en pratique clinique, que ce soit en temps de préparation, en cout humain (2 kiné nécessaires) ou en cout financier (environ 400 000€).