Après un accident vasculaire cérébral (A.V.C.), la capacité de marche et l’équilibre s’améliorent, mais ce qui sous-tend ces améliorations n’est pas claire.
Est-ce l’amélioration de la coordination musculaire ? En d’autres mots, est-ce lié à l’amélioration de la qualité de la marche ?

Marche

Jaap Buurke et son équipe ont réalisé une étude longitudinale chez des patients ayant eu un A.V.C ischémique [1]. Ils ont mesuré l’activation musculaire par EMG de surface (erector spinae, gluteus maximus, gluteus medius, rectus femoris, vastus lateralis, semitendinosus, gastrocnemius, tibialis anterior) chez 13 patients à 3, 6, 9, 12 et 24 semaines après leur AVC lors d’une marche à vitesse confortable. Ce n’est pas l’activité électrique qui a été prise en compte, car engendrant beaucoup de bruit, mais plutôt le temps d’activation (timing) [2].

La capacité de marche a été évaluée notamment par l’index de mobilité de Rivermead, la FAC (Functional Ambulation Categories), la vitesse de marche confortable. Malgré une amélioration significative de la capacité de marche jusqu’à 12 semaines après A.V.C., il n’y a pas de changement du temps d’activation des différents muscles.
En d’autres termes, l’amélioration de la marche (skill acquisition) semble résulter de la réparation neurale (neural repair) et de stratégies de compensation du membre inférieur non-atteint.

Une autre étude sur 14 patients et 14 sujets "contrôles", avec évaluation de 1 à 10 semaines après l’inclusion (délai post-AVC moyen de 35 jours), va dans le même sens [3]. Malgré une amélioration de la capacité de marche (FAC, Index de mobilité de Rivermead, vitesse de marche), il n’y a pas d’amélioration de l’asymétrie temporelle lors de la phase oscillante, co-activation des muscles de la cuisse. activation prématurée du chef médial du Gastrocnémien.

Il faut surement envisager de nouvelles stratégies de rééducation. Steven Kautz et al. ont évalué les effets d’un programme individuel à domicile de 3 séances / semaine de 90 min durant 12 semaines [4]. 20 sujets au total, un groupe contrôle et un groupe expérimental (étirements, renforcement, endurance, équilibre, membre supérieur). Aucune amélioration concernant le temps d’activation musculaire n’a été mise en évidence lors de la tâche de pédalage évaluée alors que la vitesse de pédalage a augmenté.

Ce ne sont pas des preuves formelles, mais qui amènent à se remettre en question sur l’objectif de récupérer "la même marche qu’avant" chez des sujets A.V.C.

Equilibre

Chez des patients A.V.C., il existe une asymétrie posturale, en statique ou dynamique, avec une participation à 60 % de la jambe saine et 40 % de la jambe parétique.
Cependant, le fait de tenir l’équilibre vient à 90 % de la jambe parétique, alors que chez les sujets sains, c’est toujours symétrique [5].

Mais, qu’en est-il chez des patients A.V.C récupérant tout ou partie de l’équilibre ? Une étude de cohorte a été menée chez des 37 patients A.V.C [6]. Même si l’asymétrie posturale s’améliore durant les premières semaines post-rééducation de l’équilibre grâce à la compensation visuelle, une asymétrie significative persiste et s’aggrave si l’attention n’est pas portée dessus, alors que les tests cliniques montrent une amélioration de la marche et de l’équilibre.
De plus, la sévérité de l’atteinte motrice de la jambe parétique (brunnstrom < ou = 4) et la présence d’un clonus (spasticité élevée) sont les facteurs influençant le plus l’asymétrie posturale, surtout si les troubles sont combinés, alors que les troubles sensitifs ne semblent avoir qu’une très faible influence [7]. Dans le même sens, une équipe française a montré que l’asymétrie posturale n’était pas la première de déséquilibre postural [8]. La négligence spatiale semble être un des facteurs les plus importants.

Dans une étude non publiée à ce jour, Jaap Buurke et son équipe ont évalué l’asymétrie posturale lors de la réalisation d’une tâche de la vie quotidienne (se lever, marcher, ouvrir/fermer une porte, prendre un objet, revenir en marchant et s’asseoir). Ils citent l’exemple d’un patient avec très bonne récupération fonctionnelle de l’équilibre (score sur l’échelle de Berg de 53/56) alors que le pattern de son centre de masse est anormal.

L’asymétrie posturale en faveur du membre parétique ne doit pas être une cible thérapeutique en rééducation.

Références

[1] Buurke JH, Nene AV, Kwakkel G, Erren-Wolters V, Ijzerman MJ, Hermens HJ. Recovery of gait after stroke: what changes? Neurorehabil Neural Repair. 2008 Nov-Dec;22(6):676-83.
[2] Roetenberg D, Buurke JH, Veltink PH, Forner Cordero A, Hermens HJ. Surface electromyography analysis for variable gait. Gait Posture. 2003 Oct;18(2):109-17.
[3] Den Otter AR, Geurts AC, Mulder T, Duysens J. Gait recovery is not associated with changes in the temporal patterning of muscle activity during treadmill walking in patients with post-stroke hemiparesis. Clin Neurophysiol. 2006 Jan;117(1):4-15.
[4] Kautz SA, Duncan PW, Perera S, Neptune RR, Studenski SA. Coordination of hemiparetic locomotion after stroke rehabilitation. Neurorehabil Neural Repair. 2005 Sep;19(3):250-8.
[5] Exp Neurol. 2006 Oct;201(2):441-51. Epub 2006 Jun 30.
Disentangling the contribution of the paretic and non-paretic ankle to balance control in stroke patients.
van Asseldonk EH, Buurke JH, Bloem BR, Renzenbrink GJ, Nene AV, van der Helm FC, van der Kooij H.
[6] de Haart M, Geurts AC, Huidekoper SC, Fasotti L, van Limbeek J. Recovery of standing balance in
postacute stroke patients: a rehabilitation cohort study. Arch Phys Med Rehabil 2004;85:886-95.
[7] Roerdink M, Geurts AC, de Haart M, Beek PJ. On the relative contribution of the paretic leg to the control of posture after stroke. Neurorehabil Neural Repair. 2009 Mar-Apr;23(3):267-74.
[8] Genthon N, Rougier P, Gissot AS, Froger J, Pélissier J, Pérennou D. Contribution of each lower limb to upright standing in stroke patients. Stroke. 2008 Jun;39(6):1793-9.

Pour en savoir sur la récupération de l’équilibre après A.V.C.