Contexte :
La mobilisation précoce après AVC consiste à sortir du lit le patient le plus tôt possible après son AVC (assis, debout et marche). Les bénéfices escomptés sont de lutter contre les effets néfastes de l’alitement sur le système musculosquelettique, cardiovasculaire, respiratoire et immunitaire, et favoriser la récupération en stimulant la plasticité cérébrale. Cependant cette mobilisation n’est pas sans risque, surtout dans les 24 premières heures. La position verticale peut ainsi diminuer l’apport sanguin du cerveau, ou inversement augmenter la pression artérielle par l’activité physique, risquant de provoquer des dégâts en augmentant la lésion vasculaire. Le risque de chute et de blessure qui peut s’en suivre est également à prendre en considération.
Malgré les préconisations des recommandations cliniques concernant cette mobilisation précoce, trop peu de données existaient jusqu’à ce jour pour savoir à quel moment et à quelle dose mobiliser le patient après son AVC.

Design :
Essai Clinique Randomisé Pragmatique en double insu.

Objectif de l’étude :
Une mobilisation très précoce (moins de 24h) permet-elle de réduire le handicap à 3 mois de l’AVC comparativement à une prise en charge plus classique.

Participants :
Les critères d’inclusions, d’exclusion ainsi que les caractéristiques des patients inclus sont clairement détaillés dans l’étude en libre acces.

Traitements :
L’essai clinique étant multicentrique (56 unité dans 5 pays différents), le traitement contrôle pouvait varier d’un centre à l’autre, le traitement expérimental devait lui comprendre 3 éléments indispensables : (1) être initié moins de 24h après l’AVC ; (2) être focalisé sur les activités fonctionnelles (assis, debout, marche) ; (3) comprendre 3 activités « hors du lit » de plus que le traitement contrôle.

Critères de jugement :
Les auteurs ont évalué l’efficacité du traitement (critère de jugement principal) par l’intermédiaire de la Modified Rankin Scale à 3 mois (proportion de patients ayant un score entre 0 et 2)

Résultats :
Les résultats suggèrent qu’une mobilisation très précoce diminue la probabilité d’avoir peu ou pas de handicap à 3 mois. En d’autres termes une prise en charge trop précoce diminue le devenir fonctionnel du patient à 3 mois.
Il n’y a pas de différences inter-groupes sur les autres critères de jugement : indépendance à la marche, taux de mortalité.

Conclusion des auteurs :
"Our data show that an early, lower dose out-of-bed activity regimen is preferable to very early, frequent, higher dose intervention, but clinical recommendations should be informed by the future prespecified, detailed analysis of the dose–response association"

Commentaires Actukine :
Cette étude est un exemple de ce qu’il est possible de faire en recherche clinique en physiothérapie. Plus de 2000 patients enrôlés et un taux de perdu de vue infime (1%), avec une validité interne excellente (score de 9/10 sur l’échelle PEDro).
Cette étude remet en question l’adage « plus c’est mieux » pour les premières 24h après l’AVC, cependant il serait trompeur de dire qu’une mobilisation précoce n’est pas préconisée, en effet les auteurs ont étudié à la fin de l’étude les prises en charge dans le groupe contrôle et leur conclusion est que cette prise en charge était elle aussi très précoce (seulement 5h plus tard en moyenne que le groupe expérimental). D’où la conclusion des auteurs plus fine qui suggèrent qu’une mobilisation modérée et précoce est préférable à une mobilisation intensive et très précoce.

La question est maintenant de savoir si les kinésithérapeutes français vont s’emparer de cette étude pour justifier leur prise en charge en unité post-AVC ou bien attendre que les médecins en prennent connaissance avec le risque de mal en interpréter les résultats …
Notre avenir est entre nos mains

Article en accès libre