L’exercice aérobie et l’effet placebo : une étude contrôlée

UN PEU DE CONTEXTE (Le placebo sans contexte c’est pas beau…)

Raymond Desharnais est l’auteur principal de cette étude. C’est un chercheur qui a cette époque travaille au Québec, dans un Laboratoire des Sciences de l’Activité Physique. Réalisée en 1993, l’étude de Desharnais et al. présentée ici voulait tester les effets de l’annonce sur un public sain. L’objectif était de voir si un effet placebo pouvait être obtenu uniquement en modifiant les objectifs annoncés d’un programme, en modifiant les attentes des bénéficiaires.

KESKIL’ Y A DEDANS ?

48 jeunes sujets ont réalisé un programme d’exercices de 10 semaines pendant lesquelles ils ont été supervisés.
La moitié des sujets a été amené à croire que la série d’exercices était spécifiquement conçue pour améliorer le bien-être psychologique (c’était le groupe test, celui qui va nous permettre de vérifier un possible effet d’une annonce). L’autre moitié ne subissait pas ce travail sur les attentes de bien être psychologique (groupe contrôle ; c’est-à-dire celui qui permet d’être sûr qu’aucun autre facteur n’influence le résultat).
Pour mesurer l’évolution, les chercheurs ont évalués la capacité aérobie (variable biologique de l’entraînement : VO2max, cf. encart ci-dessous) et les attentes concernant l’état psychologique. Ces dernières étaient évaluées au moyen d’un questionnaire sur le bien être ; des interrogations sur l’estime de soi au début du programme, durant le programme (à la fin de la 4ème et de la 7ème semaine), puis à la fin du programme. La VO2max a été mesuré
uniquement au début et à la fin. Après le programme d’exercices, les deux groupes ont eu une amélioration significative de leur condition physique. C’est-à-dire que dans les deux groupes la VO2max a augmentée.

Si cela augmente dans les deux groupes ce n’est pas donc pas lié à l’annonce sur le mieux- être psychologique ! Cependant c’est normal, les deux groupes ayant eu le même programme d’exercices.
L’estime de soi a été améliorée significativement pour le groupe test, mais pas dans le groupe contrôle (légère amélioration non significative). Une différence entre le groupe contrôle et le groupe d’intérêt montre donc que la variable qui est étudiée (l’annonce du but du programme) a modifié ce paramètre.

KESKI’ FAIT QUE C’EST INTÉRESSANT

L’explication de ces résultats n’est pas simple. Il ne semble pas y avoir d’effet biologique induisant cet effet psychologique. C’est à dire que le repère biologique pour voir- l’évolution lors du protocole (la variable biologique mesurée est ici la VO2max) a progressé de la même manière entre les deux groupes. Elle ne peut induire un effet psychologique uniquement dans un des groupes, si son évolution est identique dans les deux cas.

Les facteurs psychosociaux (culture, sexe, éducation…) pouvant expliquer ce résultat peuvent être mis de côté aussi, puisqu’ils étaient similaires et constants lors du protocole pour les deux groupes. Mêmes entraînements, mêmes animateurs.
Les auteurs ne concluent pas uniquement à un effet placebo, qui devrait être considéré, selon eux, comme la différence en fin de traitement entre le groupe contrôle et le groupe test (les deux ayant les mêmes attentes et les même traitements). Car, même dans le groupe contrôle, les questionnaires de départs avaient pu mettre en évidence un niveau d’attente élevé quant aux effets psychologiques du programme. Cela sans même que les expérimentateurs l’aient induit. Ils expliquent l’amélioration psychologique mis en avant dans le groupe contrôle, qui a frôlé le seuil statistiquement significatif (voir note 2), par ces attentes non induites, mais présentes.
Les auteurs concluent donc que la prise en compte des attentes, et leur modification éventuelle est intéressante lors d’une prise en charge médicale. Les sujets dont les attentes en termes de bénéfices psychologiques étaient renforcées par la procédure de modification des attentes ont améliorés davantage leur estime de soi au cours des 10 semaines.
Limites : Peu de sujets, avec un groupe très homogène au départ, et tous en bonne santé. C’est intéressant pour la fiabilité du résultat, mais l’échantillon est peu représentatif d’une population de patients. Il n’est pas évident que les attentes soient les mêmes, ou soient aussi facilement modifiables, chez des sujets malades.

POURQUOI J’AI BIEN FAIT DE LIRE JUSQUE LÀ :

Il serait donc intéressant de prendre soin du contenu des annonces que les praticiensfont au cours des séances.
En tant que praticien, prendre le temps de questionner les patients quant à leurs attentes semble permettre d’améliorer la qualité des traitements (ressentie par les bénéficiaires).