Une étude menée par B. Missaoui et P. Thoumie (France)
Les critères d’inclusion :
Une perte proprioceptive définie cliniquement, patients présentant une neuropathie sensorielle avec une perte proprioceptive bilatérale, patient présentant une SEP avec perte proprioceptive unilatérale.
Les critères de non inclusion :
Une déficience cognitive.
Une évolution de la maladie dans un délai 3 mois avant le début de l’étude.
Tous problèmes affectant la marche non lié à la perte somatosensorielle.
Méthode :
Les trois groupes ont suivis le même programme d’entrainement.
– Groupe 1 : 15 patients avec une neuropathie ataxique;
– Groupe 2 : 9 patients avec sclérose en plaques ;
– Groupe 3 : 10 sujets sains d’âge et de sexe similaires.
Intervention :
15 séances (3/semaine pendant 5 semaines, 2h par séance), divers exercices visant à améliorer la perception sensorielle, l’équilibre statique et dynamique.
Exercices conçus pour améliorer la dextérité du pied.
L’entrainement de l’équilibre statique et dynamique ont été réalisés dans plusieurs conditions avec réduction de la vision ; ainsi que de la marche sur différentes textures ou sur des mousses de volumes différents.
Critères de jugement :
Berg Balance Scale (BBS) :
Échelle de 14 items évaluant la capacité à se lever, la station debout et les déséquilibres intrinsèques ;
Timed up and go (TUG) :
Sujet assis sur une chaise doit se lever, marcher 3 mètres devant lui, retourner vers la chaise et s’asseoir ;
Functional Reach Test (FRT) :
Test d’équilibre statique ; équilibre dans différentes conditions (yeux ouverts / fermés / sur mousse).
Résultats :
Tous les patients ont présenté, par rapport aux témoins, des performances inférieures aux tests cliniques avant la rééducation.
Une amélioration significative a été observée dans tous les tests cliniques, mais les patients n’ont pas atteint les valeurs du groupe témoins.
L’amélioration a été la même sur les trois tests et correspond à un effet modéré.
Aucune amélioration statistique n’a été observée lors des tests instrumentaux.
Chez les patients atteints de neuropathie l’oscillation posturale avec les yeux fermés est restée la même alors que chez les patients atteints de sclérose en plaques on note une diminution de cette oscillation.
Discussion :
Le premier constat est de confirmer que les patients atteints de différents niveaux d’ataxie proprioceptive peuvent bénéficier d’une rééducation de l’équilibre.
En effet, la plupart des patients ont rapporté un gain subjectif qui correspond à une amélioration significative des tests cliniques.
L’amélioration aux scores FRT et TUG après la rééducation implique une progression positive de l’’équilibre dynamique quel que soit le groupe observé.
Cela pourrait suggérer que les patients atteints d’ataxie proprioceptive peuvent mieux récupérer des capacités d’équilibre dans des conditions dynamiques.
Secondairement de nombreuses compensations sensorielles peuvent être envisagées chez ces patients, de par les apports visuels et vestibulaires.
Chez les patients atteints de neuropathie l’amélioration des scores cliniques alors que leur capacité à rester statique les yeux fermés est restée similaire, suggère une augmentation de la contribution visuelle ou vestibulaire à leur contrôle de l’équilibre.
Les patients atteints de SEP ont, selon les résultats, pu améliorer l’intégration de l’information proprioceptive résiduelle et diminuer la contribution visuelle.
Avis du lecteur de l’étude :
Ce qui est très intéressant dans cette étude est la comparaison qui est faite entre les atteintes périphériques que l’on retrouve dans les neuropathies telles qu’une ataxie proprioceptive, et les atteintes centrales que l’on retrouve dans la sclérose en plaques.
Les résultats de l’étude suggèrent que lors d’une atteinte centrale il y a effectivement un potentiel dans la rééducation proprioceptive.
La plasticité cérébrale dans la sclérose en plaque a été testée dans d’autres études et il est possible de par leurs résultats de dire que la plasticité cérébrale a un rôle dans la récupération de sensibilité proprioceptive.
Or dans une atteinte périphérique, la voie lemniscale composée du faisceau gracile qui transmet l’information proprioceptive, au niveau du bulbe rachidien, ne diffusant plus l’information correctement la plasticité cérébrale ne peut se mettre en place.
Des effets compensatoires du système vestibulaire et visuel seront donc plus sollicités.
Cela pousse à la réflexion sur la prise en charge à avoir en cas d’un trouble de l’équilibre chez un patient. L’ensemble de l’étude ayant donné des résultats significatifs pour les deux groupes de patients, il peut être intéressant d’appliquer ce protocole, en ciblant, selon le patient, le travail de proprioception, ou des diverses compensations mises en place.
Référence bibliographique :
B. Missaoui et P. Thoumie. How far do patients with sensory ataxia benefit from so-called “proprioceptive rehabilitation”? Neurophysiologie Clinique/Clinical Neurophysiology, Volume 39, Issues 4–5, October–November 2009, Pages 229-233