Entre deux baignades estivales, prenez donc quelques minutes pour lire Actukiné à l’ombre du parasol.

Aujourd’hui, je sors moi-même de l’eau (j’ai pris des vacances interminables pour me rapprocher au maximum de mes amis lecteurs) pour vous présenter un petit article provenant d’un blog intéressant. Il fait écho à un autre article de synthèse du Dr Tasha Stanton à propos de 5 mythes communs concernant la douleur de nos patients.

Pour rappel, nos patients ne devraient pas croire que :
1/ La douleur est un truc qui se passe uniquement dans leur tête
2/ Les médicaments sont la seule chose capable de les aider
3/ Plus leur dommage tissulaire est important et pire est leur douleur
4/ Il faut qu’ils passent des examens poussés pour découvrir la source de leur douleur
5/ Il faut qu’ils restent imperturbables à la douleur pour la contrer

Mais comment expliquer tout cela au patient efficacement et sans le brusquer… pas simple, surtout qu’il n’existe pas de recette miracle. Les 10 astuces suivantes devraient pouvoir nous aider !

 

Astuce 1 : tenir sa langue : parler moins, écouter plus !

Ce conseil n’est pas placé en numéro un par hasard*…

La “position haute” prise par la plupart des professionnels de santé lors de leur consultation, le jargon médical incompréhensible pour le patient (les données neuroscientifiques en tête d’affiche quand on parle douleur), la saturation d’informations transmises par le thérapeute passionné souhaitant être exhaustif dans un temps assez court, la volonté du thérapeute de résoudre le problème du patient à sa place, etc. sont autant d’erreurs de communication rendant facile la transmission des “virus cognitifs”. Il est par exemple fréquent d’utiliser des mots qui vont apeurer le patient et l’ancrer dans sa chronicité… catastrophe, je viens d’écrire chronicité… catastrophe, je viens d’écrire catastrophe… grrrrrrrrrrrr !

Concrètement :
– Rester simple en préférant faire passer une seule information importante par séance pour débuter
– Éviter les mots techniques et surtout ceux à caractère négatif (usure, arthrose, dégénérescence, chronique, blocage, instable, etc.)
– Préférer les mots utilisés par le patient
– Soigner sa communication para-verbale et non verbale

 

Astuce 2 : apprendre, apprendre et encore apprendre : toujours plus loin toujours plus haut** !

“Moins on a de connaissances, plus on a de convictions.” (Cyrulnik).

Ainsi, si vous n’êtes ni politicien ni religieux, vous savez qu’il ne suffit pas de lire un seul ouvrage pour maitriser un sujet. L’approfondissement des connaissances entrainent inlassablement de nouvelles questions nécessitant la recherche de nouvelles connaissances. Il existe un effet entonnoir où une masse importante de savoir est nécessaire pour produire une réponse claire, précise et surtout utile au patient.

Concrètement : Einstein disait : “Si tu ne sais pas l’expliquer simplement, c’est que tu n’en sais pas encore assez” (notez la magnifique transition avec l’astuce 3 “à la Marie-Claire” ou au moins “à la Claire Chazal”***)

 

Astuce 3 : une fois que les connaissances sont là…

C’est à ce moment qu’il faut les organiser, les relier, les synthétiser, etc. pour être capable d’expliquer les concepts simplement et à partir de points d’entrée différents de cette masse de connaissance. Entrainez-vous à faire des allers-retours entre des explications complexes et des explications simples sur un sujet en lien avec la douleur (par exemple sur la différence douleur-nociception ou l’inhibition et la facilitation descendante). Vous devez être capable de décomposer un thème jusqu’à une explication compréhensible de tous (par exemple, entrainez-vous à expliquer les deux thèmes ci-dessus en une phrase, puis en deux et ainsi de suite). Il faut s’exercer et accepter l’échec (parce que le patient vous a surpris dans sa réflexion et son questionnement ou qu’il ne vous croit tout simplement pas) pour s’améliorer.

Concrètement : éviter le passage en force : tâter le terrain en demandant au patient de vous expliquer ce que signifie l’expression qu’il a utilisé (quels concepts/croyances derrière les mots qu’il utilise pour définir son problème). C’est par là qu’il faut commencer à travailler.

 

Astuce 4 : manipuler avec brio les analogies, métaphores et autres artifices !

Si vous n’avez pas brio sous la main, vous pouvez briller seul mais préférez des techniques adaptées au patient (à son métier, sa personnalité, etc.). Ces techniques doivent aider le patient à comprendre autant qu’à mémoriser son apprentissage.

Concrètement : vous êtes tous en mesure de compléter la liste suivante :
– Briser la gl…
– Pas d’erreur, c’est L…
– Un M… et ça repart !
– Fort comme un T…
– B… comme un coin

 

Astuce 5 : le patient n’est pas son problème !

Éviter de dire au patient qu’il se trompe, qu’il a tort, qu’il a laissé ses caleçons à côté du panier à linge ou encore qu’il n’a pas le sens de l’orientation : réserver tout cela à votre conjoint. Rien de pire que d’utiliser un style agressif pour convaincre le patient. Un message fort est de faire comprendre au patient qu’il a un problème mais qu’il n’est pas le problème. On doit chercher à mettre en concurrence notre explication rationnelle avec sa croyance erronée et non à “s’attaquer” à lui.

Concrètement : veiller à ce que le patient nomme son problème avec le ou les mots qui lui paraissent convenir. Son problème sera plus facile à manipuler si il est capable de l’extérioriser (le différencier de lui-même). Il est souvent pertinent de recourir à la technique de la tierce personne (“un de mes patients avait un jour, blablabla”) dont les avantages sont nombreux : le patient ne se sent pas directement visé, il se déculpabilise et il peut comprendre qu’il n’est pas seul dans ce cas et que vous avez déjà eu des résultats face à ce genre de problématique.

à suivre…

*YBC, auteur en psychanalyse since 1980
**droits de reproduction aimablement cédé par Mellowman
***autosatisfaction de l’auteur