Le site Body In Mind (BIM) revient sur 3 papiers du groupe de Kisaalita autour du placebo

P-L-A-C-E-B-O : voilà bien un mot qui divise les thérapeutes et vexe les patients (ou l’inverse ?). La raison ? Peut-être qu’elle provient de la difficulté à s’accorder autour d’une définition et de ce qu’elle peut "cacher"… Il existe indéniablement une confusion entre ce qu’est le placebo (disons un traitement absolument inactif administré à la place d’un traitement actif à un malade ignorant cette substitution) et son effet (disons la différence entre le résultat thérapeutique observé et l’effet thérapeutique prévisible en fonction des données strictes des effets physiologiques spécifiques du traitement : si l’effet est positif on parle de placebo et s’il est négatif de nocebo).

Une chose semble certaine : alors que l’analgésie par placebo est un phénomène physiologique actif et puissant, la vision du grand public est celle de quelque chose "d’inerte" (1). Il n’est alors pas vraiment étonnant que les populations chroniques considèrent le recours à un placebo comme une tromperie qu’ils ne souhaitent pas qu’on leur administre (2). En revanche, ce problème d’acceptation est moindre si le placebo montre une efficacité (1) : c’est le fameux "faîtes ce que vous voulez, du moment que ça marche".

Comment s’y prendre pour rendre l’analgésie par placebo plus acceptable par les patients ?

C’est à cette question que des chercheurs ont tenté d’apporter une réponse (3). Leur idée était de montrer qu’il est possible d’éduquer les patients au placebo pour manipuler leur compliance et l’efficacité de celui-ci.

Des patients douloureux chroniques ont été randomisés en deux groupes : un groupe recevait une éducation (en ligne) sur le placebo mêlant des informations sur la douleur chronique, sur les mécanismes d’action des opioïdes, le fonctionnement des attentes de bénéfices et du conditionnement, etc. ; l’autre groupe recevait une éducation sur la douleur chronique mais sans information sur le placebo. Les deux groupes étaient évalués sur leur niveau d’acceptation d’interventions basées sur le placebo avant et après cette phase éducative (par un questionnaire évaluant des EVA portant sur 3 sections : connaissances sur le placebo, acceptation du placebo et scénarios de traitement).

L’éducation améliorait significativement les connaissances sur le placebo, les conceptualisations du patient (en considérant davantage le placebo comme un traitement actif plutôt qu’inerte), l’efficacité perçue de l’analgésie par placebo. Enfin, elle contribuait à améliorer significativement l’acceptation du placebo dans presque tous les contextes y compris dans une utilisation cachée au patient (tromperie).

Les auteurs soulignent qu’il n’est aucunement question, à travers leurs travaux, de faire la promotion d’interventions uniquement basée sur le placebo. En revanche, il leur semble intéressant de promulguer des informations sur les traitements validés en expliquant qu’ils fonctionnent de différentes manières dont l’une est basée sur des attentes positives et sur un conditionnement classique pour augmenter encore leur efficacité. Enfin, ils soulignent que l’enthousiasme (communicatif !) du thérapeute pour un traitement validé est au cœur de l’engagement du patient pour son traitement en améliorant son efficacité.

Références

(1) Kisaalita N, Robinson M: Analgesic placebo treatment perceptions: acceptability, efficacy, and knowledge. J Pain , 2012.
En accès libre ici

(2) Kisaalita N, Roditi D, Robinson M: Factors affecting placebo acceptability: deception, outcome, and disease severity. J Pain , 2011.
En accès libre ici

(3) Kisaalita NR, Hurley RW, Staud R, Robinson ME: Placebo Use in Pain Management: A Mechanism-Based Educational Intervention Enhances Placebo Treatment Acceptability. J Pain 17:257–69, 2016.