<> Est-ce qu’un programme de rééducation peut améliorer, à court terme, la paralysie faciale et la dépression après une hémiplégie?
Résumé
<> L’hémiplégie est une des causes de la paralysie faciale. Les modifications de la mobilité du visage peuvent favoriser la dépression qui diminue les chances de récupérer.
<> Dans ce travail, les auteurs ont cherché à évaluer les effets d’un programme additionnel de rééducation sur la mobilité du visage et sur la dépression.
99 patients après une hémiplégie récente ont participé à cette étude. Les sujets étaient répartis en deux groupes distincts par un tirage au sort. Chaque groupe recevait un traitement par antidépresseur préventif, une rééducation du langage et une rééducation motrice. Le groupe expérimental recevait en supplément, un programme de rééducation faciale journalier qui se composait de techniques d’activation musculaire et fonctionnelle du visage. Des évaluations cliniques ont été conduites avant et après 4 semaines de traitement. Elles incluaient un questionnaire (HBGS), une analyse vidéo en 2D de la position de points caractéristiques du visage, d’un score de dépression (BDI-II).
<> les résultats ont montré une amélioration des fonctions du visage dans 62 % des cas (31 sujets) pour le groupe expérimental contre 36 % (18 sujets) dans le groupe contrôle. Des différences entre le groupe expérimental et le groupe contrôle ont été rapportées également pour le score de mobilité (différence moyenne = 9.5, 95 CI : 8.32 à 10.68) et pour celui de dépression (différence moyenne = 7.4 ; 95 CI : 5.48 à 9.32). Enfin, une association a été trouvée entre le changement des mouvements des muscles du visage et le score de dépression (r=0.69).
<> les auteurs concluent qu’une rééducation spécifique de la mobilité du visage peut améliorer certains aspects de la paralysie faciale consécutive à une hémiplégie récente.
Commentaires Actukiné
Ce travail a un intérêt pour la pratique clinique. Il permet d’attirer l’attention sur un aspect de la rééducation du patient hémiplégique qui est souvent ignoré ou moins sollicité: celui de la paralysie faciale, alors que les conséquences demeurent importantes pour les patients. Le manque d’études cliniques consacrées aux techniques de stimulation de la motricité et de la fonction des muscles du visage est un indicateur de cette méconnaissance (par exemple, aucune étude trouvée dans PEDro). À ma connaissance, aucune méta-analyse n’a évalué l’efficacité des traitements (sans doute faute d’études suffisantes). La description de ces traitements est rare et les principes de la rééducation restent vagues : quels sont les exercices proposés ? Selon quelles modalités (manuelle, auto rééducation)? Quelle quantité ? Quelle intensité ? Combien de séances ?
L’étude de Konecny et coll., ne permet pas d’ailleurs de répondre à ces questions. Les effets n’ont été étudiés qu’après 4 semaines de traitement. On ne sait pas si ces différences persistent après l’arrêt de l’entraînement. Cependant, les effets rapportés semblent importants, par exemple, le calcul du risque relatif (RR) pour le critère de jugement HBGS nous donne un RR de 1.69 en faveur du groupe expérimental. Cela signifie que les patients qui ont bénéficié du programme de rééducation de la paralysie faciale avaient 1.69 plus de chance de s’améliorer que ceux du groupe contrôle! L’importance de l’effet recueilli n’est pas négligeable même si on ne sait pas si le critère de jugement sélectionné est pertinent pour le patient.
La qualité méthodologique de l’étude est insuffisante (la randomisation n’est pas cachée et centralisée, pas d’aveugles des patients, des thérapeutes et des examinateurs, l’analyse n’est pas conduite en intention de traiter, pas d’informations sur d’éventuelles données manquantes). Il existe des risques de biais importants qui peuvent conduire à une estimation faussée de l’effet traitement. L’étude ne permet donc pas de conclure à l’efficacité de cette prise en charge.
Conclusion
Ce travail souligne l’intérêt qu’il peut y avoir à rééduquer les muscles de la face chez les patients après AVC par des techniques de physiothérapie. Peu d’études cliniques contrôlées semblent être consacrées à ce problème soulignant l’absence d’évaluation (et sans doute de pratiques) des physiothérapeutes, malgré l’impact de ce handicap chez les patients. La description des résultats de cette étude est encourageante et mérite qu’on s’y intéresse. Peut-être avez-vous une expérience de cette forme de rééducation? N’hésitez surtout pas à nous la faire partager en nous laissant vos commentaires!
Résumé accessible gratuitement ici
Référence
Konecny P, Elfmark M, Urbanek K. Facial paresis after stroke and its impact on patients’ facial movement and mental status. J Rehabil Med. 2011 Jan;43(1):73-5.