Nous l’avons dit précédemment, la composante critique des systèmes émergents est que chacun des acteurs a un statut identique : le pattern est le résultat de l’activité de la totalité des agents qui travaillent ensemble. Une action de faible amplitude d’un des agents peut entraîner un effet de très grande amplitude à l’échelle du processus (principe de « l’effet papillon »). Dans notre exemple, l’action d’une seule voiture en panne peut entraîner un bouchon extraordinaire. L’action de quelques milliers de neurones appartenant à la neurosignature douloureuse peut l’activer en totalité et donc produire l’expérience douloureuse. En cela, la douleur constitue également un processus émergent quand, pour la plupart de nos patients, elle n’est qu’un processus linéaire.
Voilà par exemple pourquoi la question qui suit « pourquoi j’ai mal ? » est « qu’est-ce qui se trouve à l’endroit où j’ai mal ?». Le patient cherche une explication directe de type cause-effet à son problème. On se heurte à ses croyances à partir desquelles il souhaite mettre en cause une seule structure et par conséquent savoir si il faut la mobiliser, la manipuler, l’infiltrer, l’enlever, etc. De manière imagée, pour avoir mal à l’épaule il faut que le sujet assemble son « puzzle douleur d’épaule » ; si il manque une pièce au puzzle la douleur ne peut pas émerger. La dernière pièce créer l’émergence mais n’est pas plus importante que les autres. Les pièces ont des formes légèrement différentes (certaines peuvent être en lien avec la nociception, des émotions, des cognitions, etc.) mais leur ordre d’assemblage n’a pas d’importance.
Faire progresser sa compréhension de la douleur d’un modèle linéaire vers un modèle émergent n’est pas chose aisée pour le patient mais c’est sans doute une étape importante dans sa reconceptualisation du phénomène…
REFERENCES
Lien vers une note plus détaillée du Neuro Orthopaedic Institute (NOI)
A redécouvrir :
Melzack R, Wall P. The puzzle of pain. Penguin: London; 1963.